Intervention de Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH

Intervention devant la Commission d’enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d’accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux et internationaux de la France (Assemblée nationale)

De quoi parlons-nous ?

La Commission d’enquête s’appelle : « migrations, déplacements de population, conditions de vie et d’accès au droit des migrants ». C’est une appellation qui nous parle au vu de la nécessité de s’interroger sur la réalité des questions migratoires dans son contexte global.Il est important de rappeler ce que signifie le mot migrant au sens généralement utilisé par l’ONU notamment quand elle parle de migrant international, soit une personne qui vit durablement (a priori au moins un an) dans un pays qui n’est pas son pays de naissance.Au sein de l’Union européenne (UE)• 27, 30 millions de personnes sont nés hors UE ; • 15 millions dans un autre État de l’UE que celui dont ils ont la nationalité.Tous sont des migrants et surtout des migrantes ; la majorité étant des femmes.Chaque année, 3 millions de nouveaux titres de résidence  sont délivrés dans l’UE dont 1,2 million sont liés à l’emploi et plus de 750 000 sont des titres liés à l’emploi délivrés à des Ukrainiens par la Pologne (https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/10189090/3-25102019-AP-FR.pdf/6551054f-19d6-f3a4-0863-34806f7cfb09).Mais en général quand on parle des migrants, ce n’est pas de ces personnes dont on parle mais seulement de celles qui ont besoin d’un visa pour venir jusqu’à nous, qui n’ont pas eu la chance de naître dans un État dans lequel les États européens délivrent facilement des visas, dans lesquels les États européens dont le nôtre ont délégué cette délivrance des visas à des structures privées et auxquelles les ressortissants de ces pays doivent payer le prix fort quelques fois plusieurs fois sans avoir de visas.Le terme de « migrants » est devenu une sorte de mot valise, auquel est attaché un certain nombre de valeurs négatives qui alimente un discours à connotation raciste basé sur les chiffres les plus fantaisistes.Lors de la crise de l’accueil de 2015/2016, on a parlé de plus d’un million de migrants arrivés en Europe, ce chiffre recouvrait essentiellement le nombre de personnes arrivées par la Turquie (850 000) dont les 2/ 3 étaient des Syriens et qui ont pour l’immense majorité d’entre eux obtenu le droit d’asile surtout en Allemagne. Mais le nombre de ces personnes, qui traversent la Méditerranée par des voies dites irrégulières au risque de leur vie, est rapidement revenu à ce qu’il était avant 2015. L’aggravation des politiques migratoires ne peut donc plus reposer sur cette justification et notre continent ne devrait pas rester le plus mortifère du monde pour les migrants.On oublie de la même façon de rappeler sans cesse comme vient de le faire le HCR que 86 % des réfugiés dans le monde sont accueillis dans des pays proches de celui qu’ils ont été obligés de quitter et donc dans des pays pauvres.

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