Peut-on librement revendiquer aujourd’hui à Lyon ? La réponse est non. Le rassemblement contre les lois liberticides prévu ce samedi 13 mars à 14 heures place Bellecour dans le cadre du Printemps des Libertés aura bien lieu mais il sera amputé sur injonctions de la préfecture. Retour en quatre actes sur cette censure.
Lundi 1er mars, le Collectif NON à la loi « sécurité globale » déclare cette mobilisation. Attache est rapidement prise avec la préfecture pour anticiper toute éventuelle question. Aucun souci a priori : le lieu est « idéal » pour être nassé, comme à l’accoutumée, par les forces de l’ordre et un rassemblement est plus facile à sécuriser qu’une manifestation. La superficie de la place Bellecour c’est aussi l’assurance de pouvoir respecter les gestes barrières. Il s’agit d’une mobilisation uniquement revendicative alternant prises de paroles de la part d’une dizaine d’organisations et intermèdes musicaux avec des artistes comme Le Son du Peuple (Psychostick, Le Peuple de l’Herbe) et Oddateee qui tiennent à manifester leur soutien aux positions que nous défendons au moment où le monde de la culture souffre énormément. Ces artistes se voient maintenant interdits d’utiliser leur mode d’expression pour exprimer toute revendication.
Mardi 9 mars, plus d’une semaine après notre déclaration et sans autre échange préalable, courrier du préfet délégué à la sécurité annonçant qu’il envisage d’interdire la manifestation pour des raisons sanitaires. Nous ne sommes pas ignorants de la situation actuelle. Néanmoins, dans le Rhône, le taux d’incidence n’est pas plus élevé qu’en décembre ou janvier et même moins qu’en novembre dernier ou aucune mobilisation n’a ainsi été censurée.
Mercredi 10 mars, changement de discours à la préfecture. Ce sont en fait les intermèdes musicaux qui les gênent mais, malgré le courrier, promis-juré l’objectif n’est pas d’interdire la manifestation. Sans rire ? Comme si, dans le contexte sanitaire et sécuritaire actuel, nous avions le cœur à organiser un événement festif ou un bal populaire place Bellecour… Finalement, après explications, revirement. OK pour le rassemblement mais vous êtes relégués place Jean Macé pour être sûr que personne ne vous entende. Et puis « il vous est demandé de ne pas adjoindre de la sonorisation musicale, ni une installation musicale ». Bref, une revendication totalement silencieuse. Hallucinant. A part une marche blanche, qui a déjà vu une manifestation sans musique ?
Jeudi 11 mars, devant notre refus de se plier à autant de changements, la préfecture accepte à nouveau la place Bellecour mais sans intermèdes musicaux sous peine de verbalisation et (certainement) de saisie de matériel. Compte-t-elle ainsi nous faire renoncer à revendiquer notre opposition totale à la loi « sécurité globale » ? Peine perdue, nous serons là samedi.
Nous pourrons ainsi dénoncer l’arbitraire total des injonctions préfectorales. Quelles différences entre notre rassemblement et la manifestation festive et revendicative des commerçants indépendants, le 8 décembre, avec chars, DJ, danse aux lanternes, soupe à l’oignon et vin chaud ? Quelles différences avec les manifestations revendicatives et musicales du monde de la culture et de soutien à La Maskarade encore le week-end dernier ?
Tandis que le processus parlementaire s’accélère avec le débat en séance publique au Sénat de la loi « sécurité globale » à partir de mardi 16 mars, la préfecture refuse désormais la retraite aux flambeaux déclarée ce jour-là à Lyon. Pour nous, malgré les restrictions et la volonté de nous museler, plus que jamais le combat pour la liberté d’expression continue.
Le collectif « NON à la loi sécurité globale ».